La crise climatique qui nous conduit aujourd’hui vers un naufrage planétaire aurait pourtant pu être en bonne partie réglée il y a de cela plus de trois décennies. C’est ce que démontre le journaliste du New York Times Nathaniel Rich, dans une enquête remarquable parue en français sous le titre "Perdre la Terre". Deux rapports produits en 1979 par des scientifiques du gouvernement américain concluaient que notre dépendance aux énergies fossiles risquait de provoquer un réchauffement mondial de 2 °C à 3 °C, avec pour conséquences la fonte des glaces de l’Arctique, une réduction de l’accès à l’eau potable et des effets majeurs sur la production agricole. Alerté par ces constats inquiétants, le gouvernement du président Jimmy Carter commanda un rapport synthèse afin d’orienter les décisions de la première puissance économique de la planète, qui était aussi le premier émetteur mondial de gaz à effet de serre. Le rapport Charney confirmait le scénario de réchauffement, tout en soulignant qu’une "politique attentiste reviendrait peut-être à attendre jusqu’à ce qu’il soit trop tard" pour éviter le pire des bouleversements climatiques. Depuis la publication de ce rapport historique, il y a maintenant 40 ans, rien n’est venu contredire les grandes conclusions des scientifiques qui avaient participé à sa rédaction.
Alexandre Shields – Le Devoir